Festival Africa Fête Marseille 2017
13ème édition
Du 30 juin au 8 juillet 2017
En septembre 1956 se tenait à la Sorbonne le premier congrès des écrivains et artistes noirs qui avait comme but essentiel de rehausser aux yeux du monde entier le statut des civilisations noires au même titre que celles des autres cultures. À l’époque, cet événement était considéré comme un tournant décisif pour les peuples de cultures noires du monde entier.
Qu’en est-il soixante ans après ce soubresaut au dessein émancipateur ? À vrai dire, la réalité semble inexorablement s’être détournée de l’espoir du consentement partagé d’une humanité manifestement composite. En 2017, il est encore nécessaire de crier « Black Lives Matter », de s’insurger contre une discrimination violente à bien des égards, d’exiger des sanctions contre ceux qui s’obstinent à ne prêter aux noirs que des traits d’animalité… Bref le constat est accablant : l’évolution fait régresser ! Car, en effet, il est juste de penser aujourd’hui qu’une orientation hégémonique gangrène nos sociétés. Elle impose un conflit de loyauté à chaque membre de ces communautés face au caractère indéniable de leur identité plurielle. Notre défi majeur pour les années à venir, en plus de l’écologie, est de pouvoir permettre à chaque individu sur terre d’exprimer son humanité et le sens qu’il donne à son existence. Du fait même de cette gangrène totalisante, il va de soi, qu’il urge de recourir, plus que jamais à la diversité. Tant elle est génératrice de créativités et ô combien primordiales pour palier des blessures vives du sectarisme et de l’essentialisme idéologique. Le Festival Africa Fête prêche cette conviction depuis 1978 aux quatre coins du monde.
La treizième édition du Festival Africa Fête à Marseille n’échappe pas à cette volonté impénitente de refléter la diversité culturelle des sociétés. C’est la raison pour laquelle le Festival soutient la campagne « aux sons citoyens », du réseau Zone France, qui vise la valorisation de la diversité culturelle. Une mise en exergue de la pluralité culturelle qui s’exprime allègrement à travers la programmation artistique du Festival Africa Fête à Marseille 2017. Pendant le Festival, un hommage sera rendu à Mamadou Konté, fondateur du label Africa Fête et défricheur de l’exportation des musiques africaines à l’international. Une nuit Konté de Mamadou par ses amis musiciens et professionnels des musiques du monde au Dock des suds. Parmi eux, Manu Dibango, Ray Lema, Cheick Tidiane Seck et les Frères Touré Kunda … qui ont marqué l’émergence de ces musiques africaines en France dans les années 70.
Africa Fête, en collaboration avec le Festival de Marseille, accueille cette année le Festival au Désert, traditionnellement organisé sur les dunes de Tombouctou au Mali, en exil depuis 2013 pour des raisons d’insécurité. Cette « caravane de la paix » représente un saisissant exemple de résistance culturelle face à une tentative de conditionnement idéologique d’un peuple. Une caravane colporteuse de pensées positives qui se compose du Ali Farka Touré Band amené par Afel Boucoum, le chanteur d’alors du guitar hero de Niafunké (Triple Grammy Awards), et les rockers touaregs du Terakaft accompagnés par Justin Adams.
Il était possible de lire sur la pochette de l’album Parade africaine, Authenticité 73 du Bembeya Jazz cette phrase : « Le retour à l’authenticité africaine, c’est le retour à l’authentique dignité africaine. Or, la dignité est un des principaux droit et attributs de chaque homme et de chaque peuple ». Après la disparition du leader de ce groupe, Aboubacar Demba Camara, celui que la BBC qualifiait « de plus grand chanteur africain », c’est un jeune griot répondant au nom de Sekouba Bambino qui redonna un second souffle à cette formation mythique. Un chanteur bercé et façonné par cette quête d’authenticité dans la diversité ethnique qui caractérise la Guinée. Une mémoire vivante que le Festival Africa Fête s’honore de présenter à son public.
En sus du Village du Festival réunissant un tissu d’associations solidaires, humanitaires et militantes, les conférences et les projections de films, un projet musical séduisant mérite également d’être mis en lumière : Balani Show Bizness. Une amorce d’ouverture des sonorités et rythmes maliens aux impétueuses distorsions et évanescentes envolées des musiques électroniques. Toute une mise en harmonie qui donne l’espoir que la musique puisse un jour détruire l’obscurantisme en illuminant nos esprits de ses sonorités insoumises. Telle est notre histoire, telle est l’histoire d’Africa Fête, telle est l’histoire de Mamadou Konté telle qu’il nous la raconte : je ne suis pas africaniste, je ne cherche pas à défendre seulement les Africains. J’essaie de défendre une idée qui profite autant aux enfants français, africains et du monde entier. C’est ça mon histoire.
Victor FAYE